Nous filons le 13 novembre par le Taje, à la nage. C'est un peu plus long, des allers-retours, mais nous avons le temps.

     Nous longeons la côte, gentiment. On essaye d'avancer un peu tout de même car Liza a une envie pressante d'Italie. Nous traversons des champs de chênes lieges.Très beaux avec leurs troncs couleur chocolat et le vert foncé de leurs feuilles.

Ravissement de voir des plantes grasses ou des cactus pousser comme de la mauvaise herbe. Des endroits aussi qui resteront cachés dans les imaginaires car l'appareil photo sera toujours trop petit. Nous réussissons à parler un peu alsacien avec les cigognes en goguette.

 

     Les chiens errants errent. Liza passe et chante Brassens...

 

     Nous visons le Cabo de Sao Vicente et à force, nous y arrivons. Vent sur cette terre plate et les nuages qui filent courent volent, le soleil rebondit, rien que pour cette lumière nous sommes heureux d'être passés par là.

    

     Cap St Vincent. Rencontre avec des gens d'outre Rhin, d'outre Manche ou de chez nous. Et parcequ'ils sont français ils s'imaginent qu'on a des choses à se dire. Comme ce cycliste fou qui "fait" 200 km par jour et même pas mal...

     Petit déjeuner en haut des falaises mais il faut que ce français vienne nous dire qu'il existe. Ce français qui a trouvé 4 belles oreilles pour écouter sa vie son malheur. Lui aussi il a cet autocollant "Nucleaire, non merci", lui aussi il a fait, lui aussi... Un petit café ? Non on doit y aller. Et cette anglaise, bien contente elle aussi de partager son ennui avec deux cyclistes, elle aussi elle aime le vélo, elle a même traversé les USA, elle aussi elle a eu mal au cul au début...

     Nous n'avons pas trouvé la sortie du monde de ce coté, alors nous mettons le cap à l'Est !

 

     Et en quittant ce bout, je suis un peu faché, un peu triste, énervé. Je roule, sous les nuages, à coté des voitures, bien à ma place sur la bande d'arret d'urgence. Urgence, Urgence qu'il se dit le cycliste mais à qui le dire ? Les pleurs et les idées qui s'entrechoquent, qui ne veulent plus rien dire.

     Mais que faisons nous là ? Le voyage et après ? Il y aura déjà eu 1000 milliard de mille qu'auront piétiné ces cailloux et bousillé ces pauvres fleurs qui n'en peuvent plus de repousser... Moi, bien naïf qui pensais découvrir des terres vierges, moi pas si con qui se doute bien que c'est pas au bout d'une terre qu'on est seul. Plus maintenant en tous les cas. J'ai 1000 ans de retard !!

     Où sont les jeunes, où sont les vieux, les sages ? Où sont les idées géniales et responsables ? Que faisons nous de cette Terre ? Bien sûr c'est kitch, mauvais, mais tellement vrai. Un sandwitch d'idées, sauce écolo. Quel sens cela a-t-il de voyager ????

 

     Comme quoi, trop de vent peut nuire à un cerveau trop exposé. Toutes ces questions se balancent dans ma tête. Liza n'est pas bien non plus. L'impression de s'être fait avoir. On ne comprend jamais tout.

 

     Toujours à l'Est, la côte de l'Algarve, du moins ce qu'il en reste, vieux souvenir de la beauté que cela a pu être. La route que nous suivons n'est qu'un énorme village de vacance. Pas la place pour camper hors les murs. Les campings, l'horreur européenne, toutes les nations y sont enfermées, aucun échange, chacun chez soi, promener le chien  et faire le tour du camping en peignoir, comme à la maison...

     Mais nous arrivons à la frontière, le rio Guadiana. Teuf teuf teuf, nous quittons notre premier pays en douceur, sans vagues. Nous refermons la porte. Et apres ? C'est une autre histoire...

 

N.B.

Un pays où tout se voit, la pauvreté, la richesse. Le grand écart des inégalités, comme partout, peut ètre un peu plus flagrant encore ?

Le portugais, qu'il faut aller chercher. Un peu comme l'Espagnol. Il n'ouvre pas sa porte comme ça. Il faut aller frapper.

Les petites épiceries sombres où tout déborde. On y va pour les petits pains du midi et puis parceque les épicières ont encore le sourire, les caissières ont oublié.

Beaucoup de drapeaux sur les maisons, dans les voitures, les jardins... Pas plus nationalistes qu'ailleurs, plutôt de la fierté je crois.

Les vieux et leurs mobylettes en ficelle, amas de tendeurs, de ressorts et de cagettes...

L'importance du casque et du rétroviseur car ils roulent très très mal. Le souvenir des pointes à 80km/h du bus à Porto...(en ville!!)

Très peu de vélos, sauf le dimanche, bien sûr... Aucun cyclo.

Et c'est quand même ici que nous nous sommes dépucelé du camping sauvage. Le camping sauvage, c'est comme le camping normal, avec plus d'ambiance. Il y a tellement de bruits que l'on arrive pas à identifier que l'imagination travaille et c'est les débuts du cinéma. Peur du fou qui rôde, de la police, du chasseur, du chien, de la nuit... On dort jamais trés bien. On se réveille souvent trop tôt mais bien contents de ne pas avoir eu à payer pour une place sur cette Terre.

Le Portugal. On est un peu passé à coté au niveau des relations humaines mais ce sont d'autres belles découvertes. Surtout le Nord, là où nous avons le plus "souffert", Porto, le Douro, les montagnes à l'Est, les chataignes, le silence, la brume...

Retour à l'accueil